« Comme un bijou » : à la Monnaie de Paris, dans les coulisses de la fabrication des médailles des Jeux

    C’est dans les ateliers de la Monnaie de Paris, quai de Conti (VIe), que les breloques d’or, d’argent et de bronze ont été confectionnées. De véritables bijoux dessinés par la maison de joaillerie et montres de luxe Chaumet. Reportage.

      C’est la rencontre entre une maison française de haute joaillerie et le savoir-faire ancestral d’une institution monétaire. L’Hôtel de la Monnaie, quai de Conti (VIe), abrite bien des trésors. Ce mardi 25 juin, la Monnaie de Paris nous a ouvert les portes de ses ateliers, où la machinerie allemande frappe quotidiennement des pièces et médailles. Et notamment une collection olympique : les médailles des Jeux de Paris 2024.

      Dessinées par la maison Chaumet (groupe LVMH, également propriétaire du Parisien - Aujourd’hui en France), les 5 084 médailles olympiques et paralympiques, objet de tous les désirs des athlètes, brillent encore en secret. Bien à l’abri des regards, pour quelques semaines encore. Seuls quelques visiteurs des lieux ont pu en apercevoir la silhouette, au loin. Nous avons pu observer de près le processus de fabrication minutieux et inédit adopté par les artisans de la Monnaie, déjà à l’œuvre pour les médailles du Mondial de rugby.

      « 40 opérations différentes »

      Inédit, parce qu’une seule breloque nécessite quinze jours de travail et « une succession de 40 opérations différentes pour lui donner cet éclat », souligne Éric Matte, responsable production des ateliers parisiens. Il faut dire qu’une fois la frappe de finition effectuée à une pression de 400 tonnes, pendant laquelle est inséré un morceau hexagonal de tour Eiffel dans la médaille, la brillance est remarquable.

      Une seule médaille nécessite quinze jours de travail.
      Une seule médaille nécessite quinze jours de travail. Philippe Servent

      « Elles sont réalisées comme on le fait pour un bijou. On lui donne un éclat, on sertit les pierres », appuie Benoît Verhulle, chef d’atelier chez Chaumet. Un bijou de 85 mm de diamètre et à peine plus lourd que 500 g. « Le dos de la médaille olympique est figé par le CIO depuis 2004. On ne peut intervenir que sur la face. Sur la médaille paralympique, on a fait le design des deux côtés », ajoute Benoît Verhulle. Du braille a aussi été ajouté sur les côtés de la seconde.

      La tour Eiffel sur la médaille et le ruban

      Avant d’arborer tous ces détails, les médailles ont subi trois frappes d’ébauche, des passages dans un four à forte chaleur, des bains chimiques. Autant d’étapes qui sont réalisées par les « chirurgiens du métal » à partir de planches d’argent — certaines composées d’or — et de bronze monétaire. Celles-ci sont ensuite découpées, avant de prendre la forme arrondie des médailles. Les toutes premières ont été frappées en décembre dernier.

      Une fois terminée, la médaille fera 85 mm de diamètre et sera à peine plus lourd que 500 g.
      Une fois terminée, la médaille fera 85 mm de diamètre et sera à peine plus lourd que 500 g. Philippe Servent

      Tout ce processus se conclut par l’insertion du morceau de tour Eiffel, issu d’une cornière d’époque, nous explique-t-on dans les ateliers. Des petits éléments de la Dame de fer datant de sa construction, ou retirés lors d’opérations de maintenance de l’édifice. Une simple frappe de finition permet d’ajouter l’insert, lui aussi travaillé sur place. La médaille d’or (environ 6 g d’or) passe elle dans un bain d’électrolyse qui permet de déposer de l’or en surface pour lui donner cette teinte. Avant la phase d’enrubannage, réalisée à l’étage supérieur de la Monnaie de Paris.



      Une phase sur laquelle Capucine Guisnet, experte qualité, intervient. « Le ruban (confectionné par la maison Neyret) est inséré dans la gorge de la médaille à l’aide d’une machine, explique-t-elle. On utilise une goupille électrique et un goujon en plastique. » L’opération ne dure que quelques secondes, et le ruban, à la dentelle en forme de tour Eiffel, ne peut plus être retiré.

      La Monnaie de Paris fabriquait les médailles des JO de 1896

      Par ailleurs, chaque médaille porte une puce, « une forme de certification électronique », précise-t-on à la Monnaie de Paris. Un dispositif qui permet de l’authentifier. Sur la tranche est déjà indiquée la compétition à l’issue de laquelle elle sera décernée. Ce mardi, c’est la médaille d’or qui sera distribuée aux championnes du basket fauteuil féminin, qui nous est présentée.

      Chaque médaille porte une puce, « une forme de certification électronique ».
      Chaque médaille porte une puce, « une forme de certification électronique ». Philippe Servent

      « La première médaille des Jeux olympiques modernes date de 1896 lorsque Pierre de Coubertin a réinventé cet événement », rappelle Marc Schwartz, directeur général de l’établissement qui fabrique entre 70 000 et 80 000 médailles par an (sans compter les décorations). « Ils ont eu lieu à Athènes (Grèce). À l’époque, la Monnaie grecque ne savait pas faire de médailles. Ils nous ont demandé. La Monnaie de Paris a ensuite répété ce travail aux Jeux de Paris de 1900 et 1924, pour les Jeux d’hiver de Chamonix en 1924, ceux de Grenoble en 1968 et les Jeux d’hiver d’Albertville en 1992, la partie paralympique. »