« Le marché va en se dégradant » : comment bien choisir sa crème solaire sans tomber dans les pièges du marketing ?

Les produits solaires affichant un indice de protection 50 ou 50 + sont de moins en moins fiables, selon une étude de deux docteures en pharmacie de l’Université de Nantes.

Les crèmes solaires estampillés 50 ou 50+ ne tiendraient pas toutes leurs promesses (Illustration). LP/ARNAUD JOURNOIS
Les crèmes solaires estampillés 50 ou 50+ ne tiendraient pas toutes leurs promesses (Illustration). LP/ARNAUD JOURNOIS

    La crème solaire est un indispensable de l’été, pour se protéger des coups de soleil et prévenir les cancers de la peau. Mais les produits sont-ils tous efficaces ? Céline Couteau, docteure en pharmacie à l’université de Nantes (Loire-Atlantique), a mené une étude sur le sujet avec sa consœur Laurence Coiffard dont les résultats ont été publiés sur leur site « Regard sur les cosmétiques » au mois de juin.

    Sur la cinquantaine de produits analysés, « une grande majorité sort des valeurs attendues », explique-t-elle. Autrement dit, ils ne sont pas aussi efficaces qu’ils le prétendent. Et d’ajouter : « D’année en année, au fur et à mesure de nos études, nous constatons que le marché va en se dégradant. »

    Le SPF à regarder avec précaution

    Lorsqu’on choisit un produit solaire, la première chose à regarder est l’indice SPF. Plus il est élevé, plus l’action de protection contre les rayons UVB, responsables des coups de soleil et de la majorité des cancers de la peau, est élevé. Le SPF 50 et 50 + est donc censé offrir la meilleure protection.

    Sauf que parmi les 17 crèmes solaires conventionnelles étudiées affichant des valeurs de SPF de 50 ou 50 + ou n’affichant aucune valeur, « nous sommes en désaccord avec les valeurs affichées dans près 70 % des cas », relève Céline Couteau. L’étude précise que « les écarts observés entre les mesures effectuées in vitro (en laboratoire) par nos soins et les valeurs affichées sur les emballages varient de 6 unités dans le meilleur des cas à 38 unités dans le pire des cas ».

    L’association de consommateurs UFC-Que Choisir, aussi, note un grand écart entre le SPF affiché et la réalité. Près d’un tiers des crèmes solaires spéciales visages annonçant un SPF 50 n’offrent pas une protection optimale, relève-t-elle. D’après son classement publié en avril, « 5 références sur 13 » sont hors des clous, dont les marques Vichy, Biotherm, Lancaster, Isdin et Rituals. L’association appelle au retrait des produits concernés et précise avoir saisi la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF).

    Un produit sans filtres minéraux et sans alcool

    Pour une protection optimale, Céline Couteau déconseille les crèmes solaires avec des filtres minéraux (oxyde de zinc, oxyde de titane). Pour ces dernières, « les écarts observés entre nos mesures et les valeurs affichées varient de 22 unités dans le meilleur des cas à 40 unités dans le pire des cas. » En revanche, les valeurs sont plus facilement respectées pour un indice 30. Un constat partagé par l’UFC-Que Choisir qui estime qu’il est « compliqué d’atteindre un SFP 50 + » avec ces barrières physiques.

    L’autre piège à éviter est de prendre un produit solaire avec de l’alcool comme ingrédient. « On lutte vraiment contre ça pour la bonne raison que l’alcool va favoriser la pénétration des filtres UV à l’intérieur de la peau. Ils vont donc passer dans la circulation sanguine et être distribués aux différents organes », souligne la chercheuse. À l’inverse, les produits solaires A-Derma, Bariésun et Bioderma, sortent leurs épingles du jeu avec « des formules efficaces et sans alcool ».



    Céline Couteau met aussi en garde contre le marketing parfois trompeur, comme avec les produits solaires spécialement conçus pour les bébés. « Ils ne protègent pas davantage et on ne met pas de la crème solaire à un bébé de moins d’un an. Il doit être protégé des rayons du soleil sous un parasol, avec des vêtements et un chapeau », rappelle-t-elle.

    La spécialiste insiste aussi sur la nécessité d’appliquer le produit en couche épaisse, toutes les deux heures et au moment de l’exposition au soleil. Pas avant. Enfin, une crème solaire ne doit pas être utilisée d’une année sur l’autre. « Ça bouge assez peu au niveau du SPF, mais il y a un risque de transformation, conclut la spécialiste. Les filtres se décomposent en générant des molécules dont certaines peuvent être toxiques. »