Rio 2016. Boxe : Mossely à jamais la première

Rio (Brésil), vendredi. Le jour de ses 24 ans, Estelle Mossely est devenue la première boxeuse française championne olympique.
Rio (Brésil), vendredi. Le jour de ses 24 ans, Estelle Mossely est devenue la première boxeuse française championne olympique. (AFP/Yuri Cortez.)
    ESTELLE MOSSELY


    Et soudain, Tony Yoka s'est écroulé en hurlant. Pas sous les coups de son adversaire croate quelques minutes plus tôt en demi-finale des super-lourds. Il a décroché son ticket pour la finale malgré une cheville douloureuse. Non, le colosse est tombé sous le poids de l'émotion en regardant sa compagne, Estelle Mossely, décrocher l'or. «Elle est championne olympique ! clame le champion du monde. Je pleure comme un gamin parce que c'est comme si j'avais gagné moi-même. Estelle, c'est moi et moi c'est elle. On a tellement partagé de sacrifices pour en arriver là, tellement travaillé...»

    Estelle Mossely, née à Créteil en 1992, a eu 24 ans hier. Inutile de lui faire un cadeau : elle a eu les plus beaux de la vie et le jour qu'il fallait. Elle est championne olympique et son futur époux s'est qualifié pour la finale. Des instants gravés en elle pour toujours. «Je ne sais pas quoi dire, je suis trop émue, souffle-t-elle. J'ai tout donné jusqu'au bout pendant les quatre rounds. Je tiens à féliciter mon entraîneur, Karim Adjir, dont la femme vient d'avoir un enfant. » La boxe française est une famille qui, même dans les plus beaux moments, pense à celle des autres : « La victoire, c'est pour lui, pour tout ce qu'il a fait pour moi. Merci à ma famille, mes supporteurs. J'entre dans l'histoire en étant la première Française à devenir championne olympique.»

    Après sa victoire sur la Chinoise Junhua Yin, la jeune ingénieur en informatique, maîtrisant l'anglais et le russe, n'oublie pas de tirer quelques leçons de ce qui lui arrive : «Cela prouve une chose. Il faut toujours croire en ses rêves, même quand ce sont les plus grands. Il faut juste se battre pour les atteindre.»

    LE CHIFFRE :

    Tony Yoka vise le titre dimanche


    Estelle Mossely donne aussi à la boxe française sa 5e médaille d'or seulement* en un siècle. Au terme d'un combat mal engagé et âpre contre une Chinoise belliqueuse. «Cela été compliqué, reconnaît Tony Yoka, parce qu'elle a perdu les deux premiers rounds mais elle est revenue à la bagarre pour aller chercher la Chinoise. Elle est allée la chercher avec tout ce qu'elle a. C'est ça Estelle !»

    Maintenant, c'est au tour de Tony d'aller chercher la médaille dimanche (20 h 15) pour la poser sur leur cheminée. «Si Estelle est championne olympique et pas moi, j'aurai l'air de quoi ? D'un tocard», avait souri le géant en débarquant au Brésil. Il n'a plus le choix. «Maintenant, c'est à moi de l'imiter. Je suis à trois rounds, à neuf minutes de ma médaille d'or olympique et je ne vais vraiment pas lâcher maintenant.» Et ainsi ne pas gâcher le bonheur d'Estelle. Car finalement, elle veut bien encore recevoir un cadeau. Mais seulement une autre médaille d'or !

    * Après Brahim Asloum (2000), Roger Michelot (1936), Jean Despeaux (1936) et Paul Fritsch (1920).

    Ourahmoune, le combat d'une vie

    Quand elle a commencé la boxe en 1995 dans une petite salle à Aubervilliers (Seine-Saint-Denis), elle n'imaginait pas qu'elle terminerait sa carrière sur une finale olympique. A l'époque, il n'était pas question que les femmes soient admises aux Jeux, elles ne le sont que depuis 2012. Une finale, c'est pourtant bien ce qui attend Sarah Ourahmoune, aujourd'hui à 19 heures, face à l'Anglaise Nicola Adams, championne du monde et olympique en titre.

    Adams, c'est la star de son sport. «Sûr, ça va être compliqué, anticipe Saïd Bennajem, son entraîneur, qui commente son épopée pour Canal +. Mais j'ai vraiment un bon pressentiment. A chaque fois, leurs combats sont super, super serrés. Adams mène mais Sarah est remontée comme jamais. Adams avait privé Sarah du titre européen en 2011. Il y a un sentiment de revanche. Je lui avais dit, il y a déjà quelques mois, si un jour, tu dois battre Adams, ce sera en finale des Jeux. On y est.»


    Seulement, Adams a balayé toutes ses adversaires à Rio. «Sarah va devoir la travailler en trouvant le juste milieu entre porter ses coups et ne pas s'exposer. L'Anglaise n'aime pas trop le défi physique, ni qu'on lui rentre dedans. Ça peut être la clé.»

    L'autre force de la maman de 34 ans de l'équipe de France, c'est son clan. Son mari est au bord du ring, sa fille de 3 ans à Paris devant sa télé et son club d'Aubervilliers est réuni à la salle devant un écran géant. «Ça va lui donner une force qu'Adams n'a peut-être pas, assure son coach. Sarah dispute son dernier combat, celui de toute sa vie. Elle a donné tellement, fait tellement de sacrifices pour cette journée. Je ne vois pas ce qui la fera passer à côté.»

    VIDEO. Rio 2016. Mossely : «C'est magique de rentrer dans l'Histoire»