Le dimanche matin de la Fashion Week de Milan printemps-été 2025, Magliano a présenté une collection qui parle de nous, de nos émotions et de vêtements “insubordonnés”. “Il était une fois... un roi, diront immédiatement mes petits lecteurs. Non, les enfants, vous vous trompez. Il était une fois un morceau de bois”. C'est ainsi que le communiqué de presse de la collection printemps-été 2025 de Magliano cite l'introduction du livre Pinocchio de Carlo Collodi.
Le nom du spectacle - Calcinculo, comme le manège dont les sièges, suspendus dans les airs, tournent - le laissait déjà présager : ce spectacle montrerait deux facettes de la vie, si différentes et pourtant si complémentaires.
Une collection que le talentueux créateur italien a dédiée à ces moments presque insaisissables qui arrivent comme un éclair dans un ciel clair. Beauté et peur, comme dans un conte de fées, où les souvenirs restent imprimés pour ce qu'ils sont. Comment Magliano a-t-il traduit tout cela ? Par des silhouettes épurées, parfois dépouillées, dans le style du début des années 2000. Dans des tons noirs et blancs, entrecoupés de quelques nuances de gris et de détails inattendus, comme des ceintures et des bijoux en raphia, fabriqués à partir de paniers d'osier détruits, et des nœuds en guise de broches, comme un symbole de révolte.
Ce sont des vêtements qui choisissent de prendre des fonctions fantaisistes et loufoques où, un peu comme au pays des jouets, tout fonctionne à l'envers : les manteaux sont en fait des serviettes et les maillots de bain sont utilisés à la place de shorts de soirée. Et puis il y a le nœud, microscopique dans le tissu, qui donne vie à la magie : il représente l'intersection de deux choses destinées à être ensemble. Une nouvelle chaussure est également née, l'Effe 10.
Le créateur fait beaucoup parler de lui depuis quelques saisons, présenté comme l'un des nouveaux venus les plus excitants et les plus prometteurs de la scène mode italienne
Né en 1987, Luca a grandi dans la province de Bologne, à côté d'une ville en pleine effervescence politique qui l'a influencé dès le début, ainsi que de la moitié napolitaine du côté de son père, dont la famille a donné au créateur inspiration, créativité et indépendance. Magliano a étudié à la L.UN.A., l'Université libre des arts de Bologne, suivi par la créative Barbara Nerozzi, dont le créateur est très proche : “Barbara m'a sevré, elle a toujours exigé de moi une attitude intellectuelle et surtout elle m'a enseigné une méthode, que j'ai adaptée à chaque saison, mais qui m'a permis d'explorer les thèmes du design et de comprendre quand une idée a de la valeur ou non”. Après ses études, sa première expérience professionnelle s'est déroulée dans le bureau de style d'Alessandro Dell'Acqua, qu'il décrit comme “un merveilleux souvenir de douceur et de solidarité entre les gens”.
Après avoir remporté le prix Vogue Who's On next en 2017 et défilé à l'édition suivante du Pitti Uomo, Luca Magliano peut désormais se prévaloir du prix Karl Lagerfeld, remporté au prix LVMH 2023, et d'une apparition en tant que designer invité, sa deuxième, au Pitti Uomo 105 en janvier 2024. Il nous avait déjà parlé de son parcours de croissance comme d'un acte d'archivage : “Je veux toujours porter de nouveaux vêtements. J'ai commencé par un processus d'accumulation d'idées qui ont servi à construire l'identité de la marque et à la crier ; maintenant, un moment de soustraction a commencé, un symbole de devenir grand”.
Un hommage à la classe ouvrière
Le monde ouvrier, plus que jamais d'actualité, se retrouve dans la sincérité et la cohérence qui caractérisent les collections du créateur italien. À commencer par les lieux eux-mêmes, comme il nous le confiait il y a quelques années : “Pour moi, il est fondamental de raconter des parties inconnues de Milan, des lieux populaires, non embourgeoisés mais fonctionnels pour la vie de la ville et de sa classe ouvrière - exactement comme Ortica, le quartier dans lequel nous avons installé le défilé du printemps-été 2023”.
Dans la continuité de ce spectacle, dans lequel il a traité le nocturne avec une scénographie faite de matelas et de draps, Magliano a présenté le thème du réveil, en se demandant si celui-ci est doux ou traumatisant. En s'inspirant des poèmes de Sandro Penna, que Pasolini qualifiait de “transgressifs mais discrets”, Luca cherche une tension esthétique pour cette saison. Ce dernier lieu est du même acabit : dépouillé et spartiate, il nous rappelle ce qui nous réveille en nous frayant un chemin dans l'obscurité. Sans demander la permission, comme l'a déclaré le créateur, et où l'aube se présente comme un nouveau départ, un moment de renaissance émotionnelle, fait d'abord d'obscurité puis de lumière.
Article initialement publié sur Vogue.it
Traduction par Marie Courtois
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