Cinéma

Vanessa Kirby est-elle une actrice sous-estimée ?

À l’affiche du Napoléon de Ridley Scott, à venir prochainement dans les salles françaises, Vanessa Kirby appartient à cette garde d’actrices qui brillent dans des rôles discrets. Avant de percer l’écran ?
MISSION IMPOSSIBLE  FALLOUT Vanessa Kirby 2018. ph David James © Paramount Courtesy Everett Collection
David James

La première fois que l’on croise son regard, c’est en princesse rebelle dans la première saison de la série The Crown, dédiée à l’histoire de la reine Elizabeth. Vanessa Kirby n’incarne pas la reine, non, campée par l’impeccable Claire Foy. Elle est Margaret Windsor, sa sœur insubordonnée, dont la vie se résume à assouvir ses moindres caprices, plongée au cœur d’un ennui presque morbide tant il est oppressant, pour la princesse comme pour les spectateurs de son désarroi.

Vanessa Kirby appartient à cette catégorie d’acteurs ambivalents, à l’apparence à la fois fragile et puissante, innocente et dangereuse – comme un oxymore vivant. Qualité ô combien précieuse pour tout comédien qui se respecte : semer le doute dans l’esprit du spectateur sur ses intentions véritables. À 35 ans, la Britannique enchaîne les rôles de femmes complexes, en proie à des drames internes déchirants, mais qui ne refusent jamais d’abandonner face à l’adversité. À son image ?

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The Crown

Née sur les planches

Enfant harcelée sur les bancs de l’école, c’est dans le théâtre que la très jeune Vanessa Kirby trouve pour la première fois son bonheur. Le vrai – celui qui a le goût de la liberté. Loin des caméras, la carrière de la Britannique naît dans les textes de William Shakespeare, Arthur Miller, mais surtout d’Anton Tchekhov, découverts grâce à des études de lettres. Qu’elle incarne Masha dans les Trois Sœurs ou Yelena dans Oncle Vania, elle cultive dès ses débuts un goût certain pour les femmes qui ne cessent de défier les règles venues les contraindre. Au cœur des années 2010, on la croise sur les planches du Théâtre National de Londres et du Young Vic, célèbre pour former les nouveaux talents du théâtre britannique.

Derrière la caméra, Vanessa Kirby y passe pour la première fois en 2016, pour incarner une jeune Margaret Windsor dans la série The Crown, diffusée sur Netflix. Son interprétation lui vaut le BAFTA de la meilleure actrice et la propulse à l’échelle internationale jusqu’à certains des blockbusters les plus célèbres, de Fast & Furious en 2019 à Mission Impossible. Elle est à ce titre très fière d’y déjouer les clichés du genre : dans la franchise Mission Impossible, elle est la Veuve Blanche, une femme fatale dont le pouvoir ne tourne pas autour de sa sexualité – comme c’est bien trop souvent le cas.

La production comme prise de pouvoir

Dans chacune de ses prises de parole, Vanessa Kirby déplore l’absence de films pensés par des femmes et pour des femmes. “À quand un Taxi Driver au féminin ?” ne cesse-t-elle de demander. Il n’est donc que peu surprenant de la voir incarner une mère en deuil dans son premier grand rôle. Pieces of a Woman, des cinéastes hongrois Kornel Mundruczo et Kata Weber est un drame aux tendances autobiographiques. Couple à la ville, le duo raconte dans ce long-métrage diffusé sur Netflix l’expérience de la fausse-couche et offre à Vanessa Kirby le rôle le plus intense de sa carrière – notamment dans un impressionnant plan-séquence d’une demie-heure – qui lui vaut le prix d'interprétation à Venise.

En 2021, nourrie de ces expériences, elle fonde avec sa sœur Juliet Kirby et la productrice Lauren Dark la société de production Aluna Entertainment, pensée pour financer des films centrés sur les récits de femmes (oui, le pluriel a son importance). Un désir nourri par des années à recevoir des propositions de scénarios où Kirby ne pourrait incarner qu’un personnage secondaire – la petite-amie du personnage principal, bien souvent. “Ce n’est que le début d’un grand changement dans le cinéma, notamment en mettant de plus en plus de parcours féminins à l’écran. Des personnages désordonnés et humains” confesse-t-elle au Sydney Morning Herald.

Incarner Joséphine de Beauharnais

Cette année, elle accepte pourtant d’incarner “une femme de”. Mais pas des moindres : Joséphine de Beauharnais, épouse de Napoléon 1er. Retour au drame d’époque donc, dans ce mastodonte réalisé par Ridley Scott – dont on connaît les récits résolument féministes, du culte Thelma & Louise au plus récent, mais tout aussi brillant Dernier Duel. Tout autant d’éléments qui n’ont pu que convaincre Vanessa Kirby d’accepter le rôle, pour lequel elle aurait parcouru presque autant de livres sur la France du XVIIIème siècle qu’une étudiante en histoire moderne.

Mère célibataire, remariée, emprisonnée, puis divorcée : il est aisé de comprendre pourquoi le personnage a plu à la comédienne, tant il est représentatif de tout ce qu’elle a incarné jusqu’ici. Des femmes modernes, qui sont des forces de la nature. Ce n’est sans doute pas un hasard si son idole de cinéma n’est autre que Gena Rowlands, dont les rôles, souvent chez son mari le cinéaste John Cassavetes, sont des bijoux de ténèbres et de complexité. Son interprétation de Joséphine de Beauharnais sera-t-elle à la hauteur ? Réponse en salles le 22 novembre prochain.

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